★ La Voie du Poulpe 1 & 2 ★

Vendredi 29 mars à 20h
Salle de spectacle MJC Jean Macé, Lyon 7ème / prix libre

« Nous sommes à Hong Kong, quelque part au milieu des années 1970. Le boom financier et immobilier est sur le point de transformer cette étrange cité-carrefour en une impressionnante mégalopole mondiale. Jean-Claude, ingénieur technico-commercial spécialisé dans les machines agricoles fabriquées en Bourgogne, accompagne une équipe expatriée dans la recherche de nouveaux marchés. Après plusieurs mois, alors que la mission piétine désespérément, une opportunité prometteuse et inattendue surgit enfin. La lumière se trouve-t-elle au cœur même des ténèbres ? C’est une question que Jean-Claude n’a pas encore eu l’occasion de se poser. »

Performance narrative et sonore
Durée approximative : 2 x 45 min. (—> donc avec 1 entracte \o/)
Texte/voix : Jindra Kratochvil ★ Musique/guitare : Stéphane Libert

Nous sommes très, très heureux de vous proposer cette nouvelle « réunion des 2 Poulpes », je veux dire une grande soirée qui réunira les deux spectacles (2017&2022) pour encore plus d’immersion dans les marchés des machines agricoles bourguignonnes dans le Hong Kong légendaire des années 70 & 80.

Le spectacle, qui commence à 20h, sera précédé à 19h par L’ASSEMBLÉE DES OISEAUX, une lecture théâtralisée à partir du poème « La Conférence des Oiseaux » de Farid Al-Din Attar, par la Cie EAUX FORTES. C’est donc une soirée qu’il convient d’appeler LE POINT DE VUE ANIMAL qui s’inscrit dans le festival culturel LE RHIZOME S’AGITE de la MJC Jean Macé.

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Faute de mieux, un retour offert

(à lire ou à écouter : le 14ème épisode de ma chronique sur Radio anthropocène, lien audio dessous)

Il est possible de commencer une nouvelle année de manière plus ou moins spectaculaire.  Il y en a qui se lancent dans les crêpes, ce qui est déjà tout à fait honorable, il y en a qui se lancent dans des prévisions de ce qui nous attend avant la fin de l’année, ce qui est bien plus hasardeux, mais il y a aussi celles et ceux qui fabriquent des engins et qui les lancent dans l’espace afin qu’ils rejoignent la Lune, par exemple, et atterrissent dessus. Et ça, c’est une ambition qui force le respect et qui attire l’attention des spectateurs du monde entier.

Ainsi donc, en qualité de spectateur des choses spectaculaires du monde, j’ai pu, moi aussi, apprendre qu’un tel engin avait été conçu et lancé récemment, pas plus tard que la semaine dernière. Une machine baptisée « Peregrine » ou Pèlerin, si vous voulez, porté par une fusée nommé « Volcan » avec laquelle il a quitté notre planète dans l’idée d’atteindre la Lune et d’alunir, comme on dit dans le milieu, le 23 février.

Naturellement, comme on pouvait s’y attendre, il n’est pas parti les mains vides. Les livraisons à destination de la Lune étant particulièrement rares, puisque la dernière fois, du côté des Américains, c’était il y a plus de 50 ans avec Apollo 17, il fallait profiter de l’occasion. Alors, regardons un peu dans la valise qui pèse une centaine de kilos. On y trouve un certain nombre d’appareils scientifiques pour explorer la surface lunaire, d’accord, mais aussi des choses plus étonnantes comme par exemple un morceau de Mont Everest, une canette de boisson énergisante, un bitcoin physique, des voitures mexicaines miniatures ainsi que plusieurs dizaines de capsules contenant des cendres et des échantillons ADN de personnes décédées ou vivantes plus ou moins célèbres (comme par exemple Gene Roddenberry, le créateur de Star Trek). Sans oublier la capsule contenant les cendres d’un chien qui s’appelait – attention, cela ne s’invente pas – « Indica Noodle Fabiano».

Vous vous en doutez, bien sûr, c’est du business, ça s’appelle un « vol spatial commémoratif » et il faut compter environ 10 000 $ la capsule. Soit déposée sur la surface lunaire, soit relâchée librement dans l’espace pour y flotter jusqu’au prochain big bang. C’est comme vous préférez, les prestations et les tarifs astronomiques en vigueurs sont consultables en ligne.

Voici donc la technique la plus pointue au service du symbolique, et même, disons, au service du religieux. Se sentir enfin connecté à l’infini. Parcourir quelques 390 000 km aux côtés d’une canette de soda énergisant, imaginer des traces de soi-même fouler la surface lunaire aux côté d’une pièce de bitcoin.. c’est tout un rêve, et c’est un rêve d’une beauté qui ne se discute pas.

Quoique – justement – en l’occurrence, ça se discute : pour la nation amérindienne des Navajos, relâcher des cendres humaines sur la Lune représente une profanation d’un corps céleste sacré. Une protestation qui n’a pas vraiment abouti, à ce qu’il semble, car elle est arrivée une « peu trop tard » sur le bureau de la direction…

Hélas, les choses ne se passent pas toujours comme prévu. Et il est arrivé à Peregrine ce qui arrive un jour ou l’autre à chacun et chacune d’entre nous : un problème technique. Eh oui, quelques heures à peine après le décollage, un truc n’a pas marché comme prévu, un bidule a probablement déconné, ce qui a eu pour conséquence d’entraver le voyage et d’obliger les organisateurs à faire demi-tour.

Ainsi donc, en ce moment-même, le véhicule défectueux se dirige vers la Terre et se consumera inévitablement au moment d’entrer dans l’atmosphère. Ceci dit – restons prudents malgré tout, l’univers est plein de vicissitudes et d’imprévus de toutes sortes. Quant aux clients qui ont déboursé 10 000 $ pour enfin quitter – ou faire quitter – la Terre… on peut comprendre la déception.

D’un autre point de vue, ils pourraient également se considérer comme chanceux puisqu’en payant un aller simple, ils ont bénéficié, pour une fois, et faute de mieux, d’un billet retour offert.

Faute de mieux, un fantôme paisible

(à lire ou à écouter : le 13ème épisode de ma chronique sur Radio anthropocène, lien audio dessous)

Nous nous croisons régulièrement les uns les autres dans les ascenseurs, nous échangeons fréquemment quelques regards, voire quelques mots à l’occasion des transactions monétaires concernant produits et services, et il nous arrive d’aller beaucoup plus loin : nous formons des couples, des binômes, des trouples, des quadruples, des familles, des groupes, des équipes, des bandes organisées et – au-delà – des entités encore autrement plus importantes et géométriquement complexes que je ne serais probablement pas capable de saisir ou de décrire.

Bref – nous sociabilisons sans cesse et pour toutes sortes de raisons, et cette activité intense, effrénée nous fait parfois oublier les bases de la pratique. Eh oui – ce sont souvent les choses les plus évidentes qui réussissent à passer inaperçues, qui parviennent à se faufiler dans les angles morts de notre perception du monde. […]

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Les sandwichs de la veille

Les sandwichs de la veille que l’on achète tôt le matin à la gare de Perrache sont souvent excellents, sauf peut-être le pain devenu mou, élastique, impossible à mâcher, impossible même de mordre dedans. La faute à l’humidité ambiante de la gare sans doute. Car on y attend en nombre, on y expire en masse, les exhalaisons circulent entre les galeries, l’air se charge, s’épaissit, sédimente, cristallise sous forme de petits déchets génériques, sous forme d’objets perdus, voire, catastrophe, de bagages abandonnés. Oh non. Encore ? On n’arrête pas d’évacuer. Les sandwichs, en revanche, se tiennent tranquilles. Restent à l’écoute. Ils absorbent l’ambiance dramatique expirée par les humains, ça les ramollit. Le souffle de la multitude pénètre dans la mie et s’y installe comme une âme errante dans un corps momentanément inhabité.

On a changé d’heure il y a quelques jours

On a changé d’heure il y a quelques jours, et je n’ai même pas écrit une ligne à ce propos. Que m’arrive-t-il ? Certes, nous ne sommes plus dans les années 2010, où l’on s’empressait de commenter chaque bon de réduction périmé retrouvé au fond d’une poche, mais, j’ai envie de dire, j’ai envie de crier : « quand même » ! Et même, pardon : »quand bien même ! » Un jour, il m’est arrivé de venir trop tôt au travail, comme peut-être à tout le monde, je suppose, c’était il y a longtemps, c’était un travail à la caisse au carrefour que je n’aimais pas tellement. Le premier novembre, un dimanche férié travaillé, en plus. Une heure trop tôt ! Une heure infinie de trop à attendre dans la salle de pause ! Comment faisait-on, déjà, sans les portables, pour passer une heure comme ça ? Eh bien, on regardait plus notre environnement, bien sûr. Le mur, par exemple. Je me souviens que je fumais en regardant le mur en face, peut-être orné de rappels de sécurité ou des infos de la part du comité d’entreprise.
Donc oui, bien entendu, quand on change d’heure, j’y pense. Je me dis « ah, tiens », et je me vois dans la trop petite salle de pause d’une trop grande surface. Mais je pourrais évidemment penser à tout autre chose !